Une critique des "Passeurs de l'ombre" sur le blog de Marianne Desroziers

Publié le par Laurence Chaudouët

C’est avec grand plaisir que j’ai lu “Les Passeurs de l’ombre” de Laurence Chaudouët paru aux éditions Assyelle. J’ai découvert l’univers mystérieux et envoûtant de cette auteur grâce à la revue l’Ampoule où elle a été publiée plusieurs fois, ainsi que sur le site des éditions de l’Abat-Jour. Je n'ai pas été surprise d'apprendre qu'elle écrit depuis l'adolescence et a commencé à publier (de la poésie) il y a une trentaine d'années, tant son écriture est aboutie et cohérente.
 
Laurence Chaudouët développe dans ses nouvelles une écriture de la blessure, de la douleur, mais aussi de l’absence et du manque. En ce sens, elle me fait penser à cette citation de Camille Claudel “il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente”. J’ignore tout de ses fantômes mais nul doute que la littérature de Laurence Chaudouët est hantée et intense.
 
Ses héros, quand ils ne sont pas des enfants harcelés ou rejetés par leurs parents, sont des adultes blessés, solitaires, des êtres en errance (voire proche de la déchéance) mais aussi en quête... qui croisent le regard d’une bête qui va les révéler à eux-mêmes. Ses nouvelles sont habitées par de nombreux animaux qui sont autant de Passeurs de l’ombre, dont la grâce, la beauté et la bonté contrastent avec la bêtise et la violence des hommes : chiens, chats, araignée, taureaux, escargots (dans "Les dieux", une des nouvelles les plus étonnantes du recueil), rossignol, rats mais aussi créatures hybrides ou géantes. Car l’écriture de Laurence Chaudouët, très subtile et psychologique, flirte souvent avec l’onirisme, voire le fantastique. Notre animalité y est autant interrogée que l'humanité de l’animal. La perspective de la mort n’est jamais loin, comme une échappatoire possible, un passage vers un autre monde. Car il y a aussi un élan mystique dans l’écriture de Laurence Chaudouët et ses personnages sont souvent attirés vers l'au-delà.
 
Au fil des pages, en lisant ces 9 nouvelles, toutes très réussies et prenantes, au style travaillé, élégant et précis (sans jamais tomber dans l’afféterie), on pourra penser tantôt à “L’araignée d’eau et autre récits fantastiques” de Marcel Béalu, excellent nouvelliste trop méconnu, tantôt au Norvégien Tarjei Vesaas et son si touchant et délicat “Palais de glace” ou au “Merveilleux voyage de Nils Holgersson à travers la Suède” de Selma Lagerlöf. Quelque chose de Virginia Woolf aussi pour dire toute la palettes des états d’âme humains et la lumière qui entre par la fenêtre d’un salon. On pourra détecter aussi une filiation avec les tragédies antiques dans les portraits de mères abusives et l'inéluctabilité sous-jacente des destins présentés. A souligner : la très belle couverture réalisée par Loren Bes.
 
Un recueil que je vous recommande chaudement. Vous pouvez vous procurer l'ouvrage sur le site de l'éditeur .
 
 
 
 
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